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Publié le par Elerina

Chap.22 Retour chez Onoro

 

 

Notre petite visite au pays aride, tout comme celle de Onoro et Norbert au pays des volcans, ne nous apporta rien de nouveau, bien au contraire, nous ne fûmes pas autorisés à rencontrer le souverain. Le message était déjà passé, on se méfiait de nous. Par contre, si notre inspection au pays des aurores se fit sans problèmes, celle-ci fut bien plus dangereuse. Allan eut un mal fou à contrôler Magenta avec qui il s’entendait d’habitude à merveille, une osmose parfaite devenue un conflit permanant. Le pays des volcans, comme son nom l’indique, était truffé de volcans, tous inactifs depuis des millénaires, or, Magenta nous amena au seul volcan qui donnait tous les signes du réveil, une vilaine fumée noire en sortait. Rien n’expliquait ce comportement, non seulement ce petit périple était presqu’à l’opposé de notre but mais surtout, c’était très dangereux, le volcan pouvait exploser d’une seconde à l’autre. Magenta s’en approchait sérieusement et pire que tout, perdait de l’altitude à son approche, il semblait tout bonnement vouloir se poser en haut du volcan. Plus nous approchions, plus la fumée s’épaississait et je suffoquais, la tête me tournait, je me sentais partir, Allan qui était derrière moi me maintenait fermement, à me faire mal aux côtes. Il marmonnait des paroles que je ne comprenais pas, mais qui finalement furent efficaces car le pégase dévia sa route au dernier moment et nous nous posâmes plus loin, juste le temps de récupérer.

-  Que s’est-il passé Allan ?

- Je ne sais pas encore, j’ai perdu le contact avec Magenta, Quelqu’un d’autre le contrôlait.

- Qui d’autre, à votre avis ?

- Seul un elfe ou un sorcier pourrait s’infiltrer dans l’esprit d’un pégase à cette hauteur, d’autant qu’il était déjà en communion avec moi.

- Les elfes noirs sont déjà là ?

- En fait il n’y a aucune raison qu’ils n’aient pas traversé la frontière eux mêmes, ayant des semi-elfes pour leur ouvrir le passage.

- Pourquoi ne pas demander à Magenta ce qu’il s’est passé ?

- Il est à bout de forces, cette épreuve l’a épuisé, il doit prendre du repos. D’autant qu’il a été touché par des éclats de pierres incandescentes. Nous avons frôlé l’irruption volcanique cher Rudy. Nous avons eu beaucoup de chance de ne pas être touchés.

- Grâce à vous, n’est-ce-pas ?

- J’ai tenté des formules de contre-intrusion. Celles-ci permettent au sujet victime d’une intrusion par l’esprit de faire le tri entre les voix qu’elle souhaite écouter et celles qui s’introduisent par force dans son esprit et de chasser la voix indésirable. Cela a marché heureusement.

Nous attendîmes que Magenta recouvre ses forces, peu de temps lui fut nécessaire en fait, les pégases sont d’une constitution robuste et récupèrent à une vitesse pour le moins surprenante. D’après sa version, c’était bien ce qu’Allan craignait, Magenta avait été guidé contre son gré jusqu’au volcan et avait reçu l’ordre de se diriger au centre même de celui-ci, il avait essayé en vain de lutter contre les ordres qu’il recevait, mais l’esprit qui le contrôlait était trop fort. Puis d’un coup la lumière s’était faite, il avait entendu la voix d’Allan et s’était concentré sur celle-ci, il avait ainsi pu se ressaisir et contrer l’autre voix.

Le reste du trajet se fit sans soucis apparent, Allan avait resserré le lien avec le pégase qui, lui, restait sur ses gardes. Nous n’avions plus qu’à rejoindre la demeure de notre vieil ami et préparer notre retour à Dornolwe. Quelle tristesse de revenir pour préparer la guerre. De tout là-haut, sur le dos de Magenta, nous pûmes constater avec effroi la marche des armées humaines, des camions par centaines se dirigeaient en direction du pays de la frontière. Durant le trajet, je mis à profit le temps libre pour prévenir Ré’hem qui se chargea, avec de nombreuses amies à elles d’informer les différents peuples elfes de la situation et de notre prochain retour.

 

Se retrouver tous chez Onoro nous fit du bien, la séparation nous avait semblée difficile car la première depuis notre arrivée en terre des elfes. Toutefois, il manquait Thoron et Sairon dont le retard nous perturba d’autant plus qu’aucun contact par l’onde n’était possible.

 

- Il n’y a que peu de possibilités pour qu’un contact télépathique ne passe pas. Nous informa Mel aldar. Etre dans un lieu sur lequel un sort qui annihile l’onde a été jeté, ou bien, être dans un état d’extrême fatigue. Or en terre des hommes, seule la deuxième solution est possible.

- Sairon a déjà été dans un état de grande fatigue lorsque nous avons fait la traversée par l’eau, s’inquiéta Norbert, il parvenait toute de même sans mal à maintenir le contact.

- J’ai parlé d’une extrême fatigue, pas une fatigue normale due à un effort inhabituel, une fatigue due à des conditions inhabituelles.

- Comme… ?

- Comme la maladie, des conditions environnantes anormales. Puis il s’adressa à Onoro. Je propose que vous et moi partions à leur recherche et qu’Allan reste ici, la présence d’un magicien ne sera pas de trop, il n’est pas impossible que votre demeure soit attaquée.

- Je suis de ton avis Mel aldar, toutefois, je vous suggère d’aller directement au désert.

- Au désert, pour quelle raison ? S’informa celui-ci

- Magenta a subit une intrusion psychique qui a bien failli nous conduire tous au cœur d’un volcan en éruption, j’ai eu beaucoup de mal à rétablir le contact, il m’a fallu user d’une magie puissante, qui nous a beaucoup affaibli lui et moi. Cette intrusion ne peut être que l’œuvre d’un sorcier noir, il est déjà difficile voire impossible d’établir un contact avec un pégase à cette hauteur, mais Magenta est aussi très fort, et contrôle normalement ce genre d’agression. Il n’est pas impossible que Sairon et Thoron aient subi le même sort et qu’ils aient été conduits, à bout de forces, au beau milieu du désert. Car ils étaient juste en bordure de celui-ci.

- Nous irons donc en premier lieu là-bas, et prendrons Vaillant et Esprit, deux courageux et valeureux pégases.

 

Ils partirent, nous laissant dans l’attente. Terrible attente. Ils ne gardèrent pas le contact avec nous car ils avaient besoin de toute leur concentration pour maintenir le lien avec leur pégase. Chacun en profita pour raconter son expédition. Il en résulta que tous avaient été marqués par cet espèce de chape de haine qui semblait s’appesantir sur les populations et l’engouement bien-sûr pour l’armée. On était clairement en état de guerre, tous les hommes en âge étaient partis, beaucoup de femmes aussi, sans charge de famille, s’étaient volontairement engagées. C’était effrayant. Mel Aldar semblait le plus anéanti de tous après cette constation.

- Je ne comprends pas, nous dit-il. C’est impossible, les humains n’ont pas pu s’associer avec les elfes noirs

- Et pourquoi pas ? répliqua Norbert, semi ironique.

- Mais parce que les elfes noirs sont des êtres répugnants !

- Et les hommes, comment les vois-tu ?

- Et bien… comme toi, comme Calion, Thalion ou Thoron

- N’oublie pas, Mel aldar, qu’ils ont été hypnotisés, pour les rois, ou séduits par les Nullafea, précisa Allan.

- Quand bien même, renchérit Norbert, tu n’as ici qu’une infime représentation du genre humain, et encore, semi-humain. Crois moi, Mel, les humains sont capables du meilleur comme du pire. Tu trouveras chez certains beaucoup de ressemblance avec les elfes. Il y a des êtres humains valeureux, qui feraient n’importe quoi pour leur prochain, jusqu’à sacrifier leur vie. Puis il reprit avec amertume. Mais il y en a d’autres…qui sont aussi abjects que les elfes noirs, qui n’ont aucune compassion, qui éprouvent même du plaisir, à voir, à faire souffrir leurs semblables, par cupidité, mais aussi, et c’est le plus répugnant, par vice. Oui Mel, tu n’imagines même pas la cruauté dont peut être capable un être humain comme moi. Alors si, c’est possible, il leva les yeux vers Allan, qui le regardait parler avec attention, debout devant lui, et il n’y a pas toujours besoin de les séduire ou les hypnotiser, les humains ont très bien pu s’associer avec les elfes noirs, et, martelant chaque mot : Et ceci en toute conscience !

 

********

 

- Pourquoi est-ce-que j’ai peur comme ça Sairon ?

- Notre mort est proche, Thoron, certainement très proche.

- J’ai toujours eu peur de mourir. Beaucoup plus que d’autres. Je ne comprends pas, elle est pourtant pour tous.

- Elle est une grande inconnue. Nous avons peur de ce que nous ne connaissons pas, la mort, nous n’avons qu’un livre qui en parle, personne n’en est revenu pour nous dire ce qu’il s’est passé.

- Ce livre, il est le même pour les elfes et les hommes ?

- Exactement.

- Je crois tout ce qui y est écrit. Mais cela n’empêche pas la peur.

- Tu y crois, oui, c’est une chose, et la plus importante. Mais elle reste la dernière chose que tu connaîtras dans ton enveloppe charnelle, après…tu sais que tu ne contrôleras plus rien, et cela, c’est effrayant. Tu dois t’abandonner, Thoron, cesse de tout vouloir maîtriser.

- Je me sens mal, Sairon, j’ai très mal à la tête.

Sairon prit Thoron dans ses bras, ultime réconfort avant qu’il ne ferme les yeux.

 

Nos amis furent de retour dans la nuit, tous les quatre, sains et saufs, mais dans quel état ! Onoro et Mel aldar les avaient effectivement trouvés au beau milieu de désert, à bout de forces mais dans une santé relativement bonne au vue des circonstances, du moins pour Sairon. Ils avaient eu exactement le même problème que nous, mais n’étant pas spécialistes en la magie comme Onoro et Allan, ils ne purent reprendre contact avec leurs pégases et furent conduits dans le désert, sans espoir de retrouver le chemin et les pégases toujours sous le contrôle d’un autre se refusaient à reprendre leur envol. Sairon avait pu subvenir à leurs besoins en eau en appelant toute l’humidité présente sous le sol et qui était ainsi remontée à la surface en un point bien précis sur lequel il avait fixé son attention. Thoron en était resté médusé de le voir faire apparaître de l’eau dans un endroit aussi sec !

- Je ne l’ai pas fait apparaître, lui avait alors précisé l’elfe, j’ai simplement fait appel à une chose déjà existante dans le sol, très profondément, toute l’humidité s’est alors regroupée et s’est dirigée à l’endroit où je l’avais appelée. Et cela, Thoron, tu peux le faire. 

Et oui, même en plein milieu du désert, sous un soleil écrasant, avec peu d’espoir de survie, il avait droit à sa petite leçon de magie…ah, les elfes ! Et Thoron fit apparaître l’eau, il suffisait d’y penser ! C’était uniquement un problème de communication avec les éléments. Ils étaient restés plus de six heures sous un soleil meurtrier. Ils n’avaient pas bougé de leur point de chute, pour préserver leurs forces, le moindre effort dans ces conditions n’aurait fait qu’accélérer leur mort et si on venait les chercher, qu’ils se soient trouvés à cet endroit ou à quelques dizaines de kilomètres aux alentours n’auraient rien changé. Ils avaient alors attendu, une aide ou leur mort. Et c’est de peu que l’aide gagna la course ! Thoron était dans un état très préoccupant, il avait fallut toute la magie des deux magiciens et l’affection sans borne d’Norbert et Sairon pour le rétablir.

 

Deux jours après notre arrivée chez Onoro, nous devions déjà repartir, sachant que le chemin du retour serait difficile, il nous faudrait faire encore plus vite qu’à l’aller. Je pris contact avec Ré’hem.

 Je viens de prévenir Ondine, elle m’a dit que les fées sont prêtes, et que ces espèces d’amochés noirs blancs et rouges avec leurs chiens de garde hideux que sont les orcs, allaient déguster ! et aussi, elle vient d’aviser les elfes de l’eau de votre départ. Ils lui ont chargé de vous transmettre qu’ils vous attendront demain matin, avec les algues, préparez vos estomacs !».

Et en plus elle avait de l’humour la petite licorne…

 

Nous partîmes donc, alors que le soleil n’était pas encore levé, il ne fallait pas nous attarder, et on nous attendait pour une nouvelle traversée des mers.

 

 

Chap.23 On nous attendait…

 

 

Ce fut à la fois bon et éprouvant de revoir nos amis des mers, car c’était pour leur apprendre des nouvelles douloureuses, qui ne présageaient rien de bon pour des temps très proches, la guerre était à nos portes. Tout allait changer. Pour le elfes des mers, nous ne voyions pas de répercutions, or il y en avaient et de terribles. Hyalma était là, nous attendant. Il avait l’esprit fermé, en proie à une vive émotion. Après les retrouvailles, il nous informa à son tour des événements qui s’étaient produits auprès des siens.

- Alarca et Undume sont allés chercher les algues nécessaires à votre traversée. Péniblement, il reprit : ils ne sont jamais revenus.

- Que s’est-il passé ? s’enquit Melaldar

- Il semble qu’ils aient été pris par une espèce mi-reptile, mi-humaine, particulièrement atroce et puissante. De part sa force physique, mais aussi de part son intelligence. Nous n’avions jamais vu ces monstres auparavant. Ils sillonnent nos mers depuis peu, mais ont déjà fait des ravages. Toutefois, en ce qui vous concerne, j’ai les algues. Nous savons qu’il est indispensable pour vous de traverser sous les eaux et une délégation de nos plus avisés guerriers est partie les chercher, peu sont revenus, mais ceux-là avaient remplis leur mission.

- Nous ne savons comment vous remercier, vous avez sacrifié bien des vies pour nous.

- Pas seulement pour vous, Mel Aldar, mais pour tout le royaume des elfes, dont celui des mers. Apparemment, ces nouvelles créatures ne sont pas là par hasard, les elfes noirs savent très bien quels liens unissent nos peuples, et en lâchant sur nous ces monstres, ils ont cherché très probablement à nous empêcher de vous aider. La guerre a déjà commencé. Allons-y. Prenez vos algues et partons dès maintenant.

 

Et nous partîmes, vite, très vite. Une délégation d’elfes marins et de sirènes nous attendait. Ils étaient très nombreux, une armée. Ils étaient tous là pour nous escorter, ils avaient pour mission de nous protéger au prix de leur vie. Si ces créatures avaient bien été créées par les elfes noirs, leur but était alors de nous tuer tous. Nous étions entourés par une multitudes d’êtres des mers de toutes sortes, car les dauphins nous avaient rejoins et nous montraient le chemin le plus sûr et les hippocampes s’étaient proposées pour être nos montures, ainsi, nous pouvions évoluer à une vitesse prodigieuse. Nous étions décidément bien servis entre les pégases et les hippocampes, qu’avait-on inventé de mieux avec nos nouvelles technologies ? Toujours est-il que nous avancions à grande vitesse, si bien que nous ne voyions que peu de choses, tout défilait très vite. Par contre, eux, nous ne pûmes les rater ! Même avertis, ce fut un choc de voir ces créatures. Immenses, en largeur, en grandeur, en muscles… et en dentition ! Onoro était à côté de moi et me regardant, ne put s’empêcher cette réflexion  les voilà, tes dragons !  Etait-ce le moment de plaisanter ? Il est un fait que le dragon était l’animal qui s’en rapprochait le plus. Une seul solution : continuer, encore plus vite, ils nous suivaient et évoluaient dans l’eau avec une aisance déconcertante pour leur carrure. Non seulement ils gagnaient du terrain, mais en plus de cela, il en venait de toute part, jusqu’à que nous soyons cernés. Aucune issue. Je voyais leurs yeux rouges de partout, leurs dents prêtes à déchiqueter. Là, ce n’est plus de la peur que je ressentais, la panique…non plus. Je ne réfléchissais plus, et j’avançais avec mon hippocampe et suivais le groupe, sachant de toute façon qu’il n’y avait pas d’issue, mais je restais dans l’action, à tout pris, jusqu’à la fin. Et elle fonçait sur moi, la fin, je la voyais si bien venir. Tant que je l’esquivais, c’était quelques secondes de vie de gagner, quelle rage plus dynamique que celle de vivre à tout prix ? Nous étions occupés à zigzaguer entre les « dragons », évitant leurs dents de quelques centièmes de millimètres, lorsqu’ils partirent. Oui, c’était bien cela, ils partaient ! Nous nous regardions tous perplexes, abasourdis même. Ne sachant plus que faire, fallait-il continuer à fuir au cas où ils reviendraient ? Mais nos montures étaient fourbues, il leur fallait reprendre des forces et nous, nous remettre de nos émotions. Et puis, je regardais Onoro et Allan, leurs sourires satisfaits témoignaient de leur rôle dans ce départ précipité. Ils nous firent juste passer une onde apaisante, non, ils ne reviendraient pas, et oui, ils en étaient sûrs. Ainsi, après une courte pause, nous reprîmes la route, nous n’en savions pas plus pour le moment, il nous fallait nous contenter de cela, l’explication, nous le savions, nous serait donnée plus tard, dès que nous aurions un moment pour nous retrouver. Effectivement, on nous attendait, les deux camps opposés nous attendaient, les uns pour savoir ce qu’il se passe en terre des hommes, les autres, pour nous tuer.

 

La traversée se fit rapidement, les pauses étaient réduites au maximum. Arrivés devant la forêt de l’affliction nous prîmes rapidement congés de nos amis, il fallait continuer, nous eûmes juste le temps de faire un feu aux abords de la forêt afin de faire chauffer de l’eau, pour nous restaurer et boire cette fameuse potion dont Onoro avait le secret et qui en un instant insufflait à nos corps, l’énergie qui s’en était retirée. Et nous retrouvâmes la forêt qui nous avait joué de fameux tours. Oui, mais là, il y avait Onoro et Allan, leur clairvoyance nous serait d’une grande utilité. Ils avaient le don de voir ce que nos yeux de semi-elfes et même ce que les yeux d’elfes ne voyaient pas, disons, qu’ils ressentaient plus qu’ils ne voyaient ou n’entendaient. Nous reformâmes nos équipes automatiquement, et je me retrouvai…main dans la main avec Allan ! Je ne m’y faisais pas, même si j’avais appris à lui faire confiance, ça me faisait tout de même bizarre. Le pire c’était son sourire narquois et les mines hilares de Dominique et Norbert. Pendant le moment de repos que nous avions pris devant la forêt de l’affliction, Onoro et Allan nous expliquèrent ce qui s’était produit avec des dragons des mers.

 

- Nous avons très rapidement cerné la façon dont fonctionne ces animaux. Et ce fut très simple à comprendre. Ils agissent en meute, comme les loups et se fient donc à leur chef. Il nous fut simple de repérer les chefs, ils étaient quatre, les plus gros, et avaient sous leurs ordre une dizaine de dragons chacun. Nous nous sommes introduits dans leur esprit et avons tout bonnement copié nos ennemis sorciers noirs. Ce qu’ils ont fait avec les pégases, nous l’avons fait avec leurs dragons. Nous nous sommes présentés comme leur autorité et leur avons commandés de nous laisser tranquilles. Ce qu’ils ont fait.

 

Ca paraissait tellement simple comme ça, mais savoir comment dans la panique du moment ils avaient pu garder leur sang-froid, jusqu’à les observer et comprendre leur fonctionnement et détecter parmi ces hordes lesquels étaient les plus gros et donc les chefs, s’insinuer dans leur esprit et les commander…très fort ! J’en venais à douter que ces deux magiciens fussent de simples humains. Nous étions témoins chaque jour d’avantage de leurs pouvoirs prodigieux.

 

La traversée de la forêt se fit bien sûr beaucoup plus facilement que la première fois, j’étais toujours très sensible aux murmures des morts mais l’esprit d’Allan ne me quitta pas une seconde, il me connaissait bien, et se doutait de cette faiblesse. Je reçu de lui des paroles d’encouragement dans les moments les plus difficiles, où les murmures se faisaient cris, ou les appels se matérialisaient comme des mains qui me tiraient vers eux, d’une force inouïe. Mais la voix d’Allan avait le dessus. Elle s’était faite rassurante et impérative, c’était elle que je devais écouter et aucune autre. Sortis de la forêt je savais une chose de plus sur lui : il ne devait plus avoir beaucoup à apprendre de son maître !

 

 

 

 

A la sortie de la forêt nous attendait un spectacle dont je ne me remis jamais ! Une multitude de fées de toutes sortes et de toutes les couleurs se présenta à nous, accompagnées par tous les pégases de la terre des elfes réunis, ce qui donnait un ensemble neigeux et lumineux surélevé du scintillement des fées. Nos yeux semblaient envoyer à nos cerveaux des images qu’ils ne croyaient pas concevables, c’était trop pour nos esprits encore trop rationnels. De leur taille réelle, elles étaient hautes d’une trentaine de centimètres, mais, comme l’avait fait Ondine, elles pouvaient prendre la taille humaine, mais leurs pouvoirs diminuaient alors beaucoup.

 

Ondine se démarqua et vint à notre rencontre.

- Permettez-moi de vous présenter le peuple des fées au complet. Puis, prenant notre taille elle s’installa avec nous autour du feu que Onoro avait fait apparaître afin de nous préparer un repas simple mais revigorant.

- Je vois qu’il existe plusieurs types de fées ? remarqua Thalion. Pourrais-tu nous expliquer en quoi consistent ces différences ?

- Bien volontiers, cher et valeureux semi-elfe,

Lui répondit-elle en se courbant devant lui, comme elle le faisait avec les pégases d’ailleurs, bizarre ! Elle fit signe aux fées qui avaient entamé différentes conversations entre elles. Trois d’entre elles s’approchèrent, l’une était un peu plus grande que les autres, avec des ailes de papillon, aux couleurs vives, plus cette fée s’approchait, plus elle semblait différente de ce que j’imaginais. Normal, le visage et le corps n’était pas celui d’une femme, mais d’un homme…Il avait des cheveux longs attachés en queue de cheval et des vêtements verts, les autres étaient habillés de toutes les couleurs existantes, ils étaient une explosion de couleurs vives.

 

- Voici les fées magiciens, comme vous le constatez, le peuple des magiciens est la version mâle des fées. Ils sont un pouvoir de combustion. C'est-à-dire qu’ils peuvent consumer à bonne distance dans les airs un être de votre taille sur terre. C’est un éclair puissant qui sort d’eux au moment qu’ils désirent et dans une direction très précise avec une force plutôt…phénoménale parfois, cela dépend de la fée. Certains ont beaucoup développé ce pouvoir. En fait, pour la plupart, ils sont très doués.

 

A l’instant, l’homme-fée piqua droit vers le ciel, si haut que notre vue ne suffisait plus pour le discerner et une demi-seconde plus tard une éclair jaillit du ciel et provoqua un cratère, d’une taille plus que respectable, à quelques centimètre de mes pieds. OK, on avait compris !

- Enchanté, même très honoré de faire la connaissance, enfin, des héros de la terre des elfes…

Nous ne l’avions pas vu redescendre, il était déjà là, à côté de moi, me regardant avec respect.  

- …désolé de vous avoir fait peur.

Il avait sorti cette tirade d’un trait, en se courbant, lui aussi, bien bas devant nous, ça devait être une coutume chez les fées.

- Nous offrons nos services dès ce jour. Pour le moment, nous vous servirons de sentinelles car, les quatre peuples des fées sont dotés d’une vue extrêmement développée et de là-haut, la vue est imprenable !

- Vous avez tout notre respect lui répondit Melaldar en se courbant à son tour.

Puis Ondine reprit les présentations, alors que se rapprochait timidement de nous une fée, qui ressemblait plus à une plante qu’à une fée. Elle était vêtue de différents tons de verts, ses ailes avaient la forme et la couleur de feuilles d’arbres, ses cheveux étaient bruns, de la couleur d’un tronc d’arbre en fait.

- Voici les fées des arbres. Leur particularité comme vous le voyez, est de se fondre dans leur environnement, la couleur de leurs ailes et de leurs cheveux varient en fonction des saisons, elles deviennent orangées à la saison flamboyante et vertes pendant la saison de vie.

Il est vrai qu’en pays elfique, il n’y avait que deux saisons, celle de vie correspondait à notre printemps et durait neuf mois, le temps y était doux, pluvieux de temps en temps, et la saison flamboyante, où comme notre automne, la nature se parait de couleurs rouges, oranges, brunes, il y faisait plus frais, la lumière était moins éclatante et faiblissait pendant quelques heures chaque jour pour être aussi faible qu’un clair de lune. Il n’y avait pas de saison froide ni de grosse chaleur, l’idéal quoi !

- Les fées des arbres sont dotées d’un pouvoir de contrôle sur les éléments, elles peuvent ordonner à la végétation d’emprisonner par leurs branches et leurs racines les imposteurs, des les étouffer même…..quand la situation l’exige. Plus que tout autre peuples de fées, elles arborent la violence, et sont d’une nature craintive et préfèrent se cacher, mais, là, le peuple des elfes est en danger, alors…

Elle fut coupée par la petite fée verte :

- Les fées des arbres sont honorées de pouvoir être utiles dans la lutte pour la terre des elfes, nous vous assurons de notre aide et sommes prêtes pour la guerre, puisque guerre il y aura.

Elle sembla entrer dans un intense concentration, quoi, trois petites secondes et l’herbe sous nos pieds poussa, poussa, poussa tout en s’entourant autour de nos jambes, torse, bras et serraient de plus en plus fort jusqu’à nous couper le souffle et la respiration. En quelques secondes, nous étions pris au piège, incapables de nous en sortir, trois toutes petites secondes plus tard, tout était redevenu normal ! Elle se retira si vite que Mel aldar n’eut pas le temps de répondre quoi que ce soit !

- Il y a les fées libellules, dont je fais partie.

Les fées libellules étaient les plus petites, frêles même. Elles avaient toutes des cheveux très longs, lâchés, très clairs, presque blancs et une peau d’un ton ivoire lumineux, elles étaient l’image même que tout être humain peut avoir de la fée.

- Notre pouvoir se cache dans nos chants. Les hommes parlent de légendes concernant le chant des sirènes, et bien, c’est le même procédé. Nos chants ont le pouvoir réel d’envoûter ceux qui se trouvent près de nous. La personne hypnotisée par nos chants n’est plus maîtresse d’elle-même et nous est soumise, tant que dure notre chant. Bien entendu, ce pouvoir s’accroît avec le nombre, ainsi, notre attaque favorite et d’entourer un groupe de personne et de voler en ronde autour d’elles tout en chantant. C’est à ce moment qu’interviennent…les fées noires.

Elle avait changé de ton en prononçant des deux derniers mots, son visage s’était crispé et sa voix avait faibli. Il fut facile de comprendre d’où venait cette crainte à l’évocation de ce peuple des fées noires… Elles étaient plutôt intimidantes, voire inquiétantes. Elles portaient bien leur nom, noires, elles l’étaient, pas de peau, au contraire, elles avaient un teint diaphane, comme les libellules. Mais sur leurs visages étaient tatoués des arabesques qui leur donnaient un charme troublant, captivant, elles avaient une épaisse chevelure noire, très longue, et portaient des vêtements longs et vaporeux, qui flottaient dans l’air. Leurs ailes étaient immenses, proches de celles des papillons, et noires, on n’en percevait pas les contours, c’était comme si elles étaient faites de voiles variant du noir transparent au noir intense. Et elles avaient un sourire…quel sourire…Ensorcelant. Je pris carrément peur car je compris vite que regarder ce sourire quelques secondes de trop pouvait avoir de fâcheuses conséquences….Et c’était effectivement le cas. Leur bouche était leur arme. Ce fut elle qui prit la parole pour présenter son peuple.

- Je me nomme Ombre, je fais partie des fées noires. Nos baisers sont mortels.

Elle s’approcha tout près de Thoron, très près, dangereusement près !

- Lorsqu’une personne est sous le pouvoir des fées libellules, nous nous approchons d’elles et l’embrassons. Instantanément…la personne meure !

 

Elle avait dit cela avec jubilation, puis dans un murmure, elle dit à Thoron : je peux vous en faire une petite démonstration, elle allait le faire, si Ondine ne lui avait pas foncé dessus et bousculée, ses lèvres avaient effleurées celles de notre ami. Il vacilla un instant, puis se remit doucement, soutenu par Melaldar. Nous ne connaissions pas la colère des fées, nous en fûmes spectateurs. Hallucinant ! Ondine avait viré au rouge, ses ailes battaient frénétiquement l’air, signe de grande nervosité chez ces êtres fabuleux.

- Que comptais-tu faire ?

- Oh, c’est bon, t’énerves pas, tu vas froisser tes petites ailes !

- Ne te moques pas de mes ailes, elles sont petites mais efficaces, et pas du tout encombrantes comme les tiennes ! Alors ? Puis dans un cris perçant, poussant nos tympans à leur limite la résistance:

- Tu aurais pu le tuer !

- Et alors ? Ils auraient été rassurés sur nos pouvoirs ! Et puis, il est tellement mignon, je n’ai pas pu résister !

- Mais, on ne tue pas pour le plaisir, et nous avons besoin de lui, comme des autres et puis, ils auront l’occasion de voir vos pouvoirs bien assez tôt.

Puis elle se tourna vers nous :

- Nous n’avons de communs que le nom avec ces êtres détestables. Précisa-t-elle en les montrant d’un petit signe du menton.

Ombre avait déjà rejoint ses congénères, apparemment très satisfaite de son petit coup d’éclat.

- Elles adorent nous mettre en colère, c’est même leur préoccupation première !

Elle tentait vainement de retrouver son calme, son teint reprit tout doucement sa teinte naturelle, ses ailes battirent moins vite et nous…notre capacité d’audition semblait avoir baissé d’un cran. Incroyable ce que le cris d’une si petite créature pouvait atteindre comme décibels.

- Toutefois… il faut reconnaître que leur pouvoir est efficace. Alors, dans des temps troublés comme maintenant, nous devons nous unir.

Vaillant s’approcha à son tour et s’inclina devant nous, chose très rare venant de ces êtres fiers. Nous lui rendîmes la politesse. Il nous communica en pensée que tout le clan des pégases ainsi que les licornes était prêts à se battre à nos côtés. Ils nous serviraient de monture, ce qui nous donnerait un sérieux avantage.

 

 

 

Partie V

Guerres

 

 

 

Chap.24 Bess-dinen

 

Elle regardait les troupes de l’armée des hommes traverser la frontière. Combien étaient-ils ? Des milliers probablement, tous armés de lances et d’épées, tous le regard haineux et volontaire. Bess-dinen aussi avait le regard résolu, elle aussi était prête pour cette guerre à laquelle on la préparait depuis sa petite enfance, elle aussi en voulait aux elfes qui les avaient relégués sous la terre, il y avait très longtemps de cela, mais ils allaient payer pour cela, bientôt, très bientôt. Toute cette rage qui bouillait en elle allait pouvoir enfin ressortir. Car c’était ainsi qu’elle avait été éduquée, dans la soif de la vengeance, toute sa jeune vie, elle avait entendu cela  Nous leur ferons payer, leurs terres seront les nôtres, ils seront nos esclaves, et nous les traiterons comme tels. Elle n’avait pas la peau noire, mais très claire, elle n’avait pas les cheveux blancs, mais très noirs, et ses yeux étaient verts et non rouges, en fait, elle n’avait des elfes noirs que l’esprit. Elle ne parlait pour ainsi dire jamais, peu connaissaient le son de sa voix, ils l’avaient alors appelée la jeune fille du silence : Bess dinen. Vingt ans plus tôt, elle était née en terre noire, fruit de l’union d’un elfe noir et d’une humaine. Sa mère avait été tuée aussitôt après qu’elle fut sevrée, Bess devait être élevée dans l’esprit des elfes noirs, en apprenant la haine. Sa mère aurait pu lui inculquer quelques notions d’amour et de bonté, or cela, il ne le fallait surtout pas ! Les semi-elfes noirs étaient sept, le même sort avaient été réservé à leurs mères, elles avaient été enlevée du monde des hommes, emmenées en terres noire, abusées et tuées après avoir sevrés leur enfant. Aucune n’y avait échappé. Les semi-elfes avaient été éduqués afin de nourrir une haine féroce contre les autres elfes, et instruits très sérieusement sur la politique de chaque pays du monde des hommes. Lorsqu’ils furent prêts, ils furent envoyés, chacun dans l’un des sept pays afin de se faire accepter du roi, avoir sa totale confiance et devenir son plus proche conseiller, celui que le roi écoutait plus que tout autre. Pour cela ils avaient un pouvoir de persuasion incontournable, un talent certain que le sorcier noir leur avait inculqué. Il était impossible de résister à leur volonté. Certes, ils avaient des pouvoirs qu’ils avaient appris à faire grandir mais il y avait autre chose, une source de pouvoirs phénoménaux enfermés dans un rubis, dans lequel ils puisaient leurs forces, au-delà de toute force humaine et même elfique. Tous les elfes noirs de leur armée en étaient aussi pourvus, certains le portaient en bague, d’autres en bracelet.

Bess-dinen portait ce joyau en diadème sur son front, un diadème très fin, fait de branches d’argent tressées finement, et le rubis reposait comme une goutte de sang sur son front. Elle était éblouissante de beauté, elle n’avait rien pris du physique ingrat de son père. Elle avait œuvré dans l’ombre. En surface , surprenante toute jeune conseillère du roi, aimée de tous, plus d’un s’étaient jetés à ses pieds pour la demander en mariage, le roi même éprouvait pour elle des sentiments inavouables qu’il avait d’ailleurs eu soin de garder secret ! Mais dans l’ombre elle travaillait sous la férule du sorcier noir dont elle recevait les ordres par le cristal, que plus tard elle offrit au roi afin qu’il soit hypnotisé. Elle estima son devoir accompli lorsque le roi leva l’armée et partit avec ses hommes pour la guerre, et fut rappelée aussitôt en terre noire.

Voir ces troupes d’hommes avancer la rendait euphorique, c’était le résultat de son œuvre, et de celle des six autres semi-elfes, une première victoire. La veille, elle avait assisté à un autre phénomène qui l’avait réjouit aussi, l’arrivée des armées orques à la frontière entre leur pays et celui des centaures. Ce peuple hybride mi-homme mi-cheval était un obstacle à franchir entre eux et Dornolwe. Les centaures protégeaient en quelque sorte les elfes avec qui ils avaient beaucoup d’affinités. Mais cette fois ci, que pourraient faire ce petit peuple d’hybrides contre une armée d’innombrable orcs, hideux,violents,hargneux ? Ces monstrueuses créatures étaient aussi totalement indisciplinées ce qui aurait pu poser quelques problèmes d’ordre, sans le pouvoir de persuasion des elfes noirs, en grande partie dû au rubis. Sans cette pierre, même leur grande supériorité numérique ne serait pas venue à bout de ce peuple intelligent et fort. Mais le rubis était une arme à laquelle ni les centaures, ni aucun des peuples elfiques n’avaient pensée. Oh oui, la victoire était assurée, leur nombre, leur force, la puissance du joyau, tout y était, ils ne pouvaient que vaincre.

 

 

 

 

Chap.25 Retrouvailles à  Dornolwe

 

Il y avait une réelle effervescence à Dornolwe, tout comme en terre des Elfes Sylvains Doraldar (terres des arbres) ou à Dorcalima (terre de la lumière) la terre des hauts elfes. La guerre se ressentait jusque dans le moindre frémissement des feuilles des arbres, tout ce qui vivait était sur ses gardes, ils étaient prêts.

Gilgaldor et Celerathiel furent émus de nous revoir tous, leur accueil fut plus que chaleureux, autant que cela soit possible chez les elfes, quoique assombries par le spectre de l’affrontement qui nous attendait tous avec les elfes noirs, car tous nous étions concernés, tous nous nous retrouverions dans le combat, les armes à la main. Très vite, le roi des elfes gris fit état de la situation.

- Nos armées sont levées et prêtes pour le départ. Nous n’avons pas de temps à perdre. Nous attendions votre retour pour nous mettre en chemin. Nous partirons demain si cela vous convient. L’armée des elfes de la forêt se joindra à nous et nous nous rendrons tous à la frontière entre la forêt sombre et Dorcalima. Le peuple des Centaures défendra son propre territoire car il n’est pas impossible que des troupes attaquent par leurs terres.

- Les fées seront aussi à nos côtés ainsi que les pégases qui nous ont offert leurs services en tant que montures, les licornes ont fait de même. Ajouta Melaldar.

- Comme c’est noble de la part des pégases et des licornes, remarqua Celerathiel. Mais les fées, que vont-elles pouvoir faire dans un tel combat ? Elles ne sont pas préparées à cela

- Détrompez-vous ! s’écria Thoron, puis il se reprit, excusez mon audace. C’est seulement que nous avons pu…comment dire, expérimenter de quoi elles sont capables lorsqu’elles sont en colère et croyez-moi, nous pouvons leur faire confiance. Elles nous seront d’une grande aide. Il en tremblait encore !

- En ce moment, elles sont chargées de surveiller la progression des troupes ennemies, elles peuvent monter très haut et ont une vue perçante. Meilleure que la notre je dois l’avouer (houlàlà que ce fut dur pour Sairon d’admettre qu’un autre peuple avait une meilleur vue que les elfes !).

- Si vous le dites. Tout ceci ne peut que nous encourager. Et nous en avons besoin, car si je me réfère à ce que m’a annoncé Réhem, toutes les nations des terres des hommes ont levé une armée, phénoménale. Sans compter les orcs qui sont puissants et qui ne vivent que pour tuer.

- Allez savoir aussi s’il n’y a pas autre chose… Le ton que prit Onoro était mystérieux et proprement alarmant.

- Que voulez-vous dire ?

- Allan et moi-même avons ressenti d’étranges vibrations aux abords des terres noires, quelque chose que nous ne connaissons pas mais qui a mis nos sens en alerte. Ajoutons qu’en terre des hommes rôdaient d’innombrables Nullafea crées pas le sorcier noir, et que sous l’eau, nos amis ont eu affaire à des êtres ressemblant à des dragons des mers, redoutablement puissants et féroces.

- Qu’en déduisez-vous, maître magicien ?

- Que nous devons nous méfier, ils ont peut-être une arme secrète. Sous la forme de dragons. Convenez-en, nous n’avons aucune certitude quant à leur disparition. Il tourna alors son regard vers moi et me transmit un apaisement. Il avait senti ma frayeur monter d’un cran à l’évocation de ces bêtes que je croyais, moi, purement et simplement issues de l’imagination.

- Je propose que nous prenions tout du repos, reprit Celerathiel qui captait toute la peur montante dans les esprits des semi elfes, nos corps et nos esprits en ont grandement besoin.

- Reformons les binômes pour la nuit, suggéra Yvan, nous avons besoin de nous soutenir mutuellement et c’est le meilleur moyen.

 

Il y avait quelques mois de cela, me retrouver pour la nuit avec Allan m’aurait purement et simplement épouvanté. Mais plus alors. J’en fus au contraire soulagé. Je crois que ma haine s’est transformée en confiance sans bornes après la forêt de l’affliction. Son esprit était resté connecté au mien pendant plus de dix heures sans relâche. Ayant eu vent de ce qui s’était passé lors de ma première traversée, il n’avait cessé de traquer la moindre faille, le moindre écart de ma part et m’avait soutenu par des paroles d’encouragement que seul un ami véritable peut connaître ! Il m’avait donné les preuves de son intégrité envers moi. Cette nuit là, encore, il sut trouver les mots magiques pour calmer mes angoisses.

- Allan, je vais vous avouer quelque chose.

- Dites.

- J’ai peur. Vraiment. Une de ces terreurs qui vous dévorent tout à l’intérieur, qui fait mal au ventre. Je ne suis pas comme ces vaillants chevaliers qui allaient au combat le sourire aux lèvres, avec la seule pensée de vaincre pour la gloire et l’honneur, la joie de sauver un peuple ou un roi. Je n’ai rien de tout cela, que la peur.

- Cessez !

Son ton autoritaire m’avait stoppé net ! Je me sentais redevenir l’étudiant d’avant devant le monstrueux professeur Allan !

- Justement non, vous n’êtes plus cet étudiant d’il y a quelques mois,(mince, j’avais encore laissé mes pensées vagabonder trop librement…) vous êtes Calion, le lumineux, vous êtes un elfe autant qu’un humain, faites donc taire vos faiblesses humaines. Savez-vous comment fonctionne un elfe ? Lorsqu’il est dans la forêt il centre ses pensées dans la forêt, il est alors partie intégrante de la forêt, lorsqu’il est avec un ami, il centre ses pensées sur cet ami, il connaît alors ses plus intimes pensées, lorsqu’il est au combat, il en est de même, il ne pense pas à la mort, ni à ses amis qui pourraient périr, ni à son peuple, il est partie intégrante de son arc et de son épée, et alors, il n’y a plus de place pour la peur. Je vous connais Calion, je sais que vous valez bien mieux que ce que vous pensez de vous, j’ai confiance en vous. Vous vous voyez comme l’humain que vous étiez sur les bancs de la classe, je vous vois comme l’elfe que vous avez réussi à faire ressortir. Maintenant, il doit prendre toute la place. Soyez elfe dans toutes vos fibres. Regardez moi dans les yeux, soyez elfe.

Je fixai son regard et concentrai toutes mes pensées en lui. C’est vrai que c’était devenu très facile, un exercice auquel Sairon nous avait soumis tous les jours, qui s’était révélé très difficile au début, et là c’était tout naturel, je n’avais qu’à faire appel à Calion, l’elfe. Et alors je vis. L’elfe Calion dans les pensées d’Allan. L’amour qui entourait ses pensées me submergea, je compris. C’était un amour que je ne connaissais que très mal, que l’on trouve chez les elfes, pas physique, pas amical, plus que tout cela. Je me ressourçais dans ces ondes bienfaisantes et en ressortis fortifié. Calion, j’étais Calion, un elfe.

- Merci Allan. C’était ce qu’il me fallait. Comment se fait-il que je n’aie pas découvert cet amour plus tôt ?

- Vous n’étiez pas prêt à le comprendre et donc à le recevoir. Maintenant prenez du repos, et concentrez-vous sur le repos, rien d’autre. Puis il reprit, l’air surpris, au fait, étais-je un si monstrueux professeur ?

- Monstrueux…c’est un euphémisme !

- Ah bon, voyez vous cela ! Vous m’en voyez navré !

- Sincèrement ?

- Non ! Je me suis bien trop amusé !

Publié dans peraldar

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